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L'épopée atlante
((( Petite anthologie atlante - 4 )))


Plan

 

Francis Bacon
(New Atlantis)

Le philosophe anglais Francis BACON (1560-1626) n'aura pas eu le temps de terminer ce qui reste son oeuvre la plus populaire (et ceci dès le XVII° siècle): "New Atlantis" . Cet ouvrage, connu en français sous le nom de "La nouvelle Atlantide" , décrit, dans le goût de l'époque, une société idéale vivant par et pour la science dans une île inconnue du monde quelque part dans le Pacifique sud.

"Tempora patet occulta veritas" (Avec le temps, la vérité cachée finira par apparaître) est l'épigraphe célèbre de ce beau livre.

 
 

 

 

Francis BACON
New Atlantis

L"'Intendant de la Maison des Etrangers" fait aux navigateurs européens qui viennent de débarquer un bref historique de son île dans lequel l'auteur ne peut s'empêcher de glisser quelques allusions à l'Atlantide originelle:

(...)

Sachez d'abord ceci, qui peut-être vous semblera à peine croyable: il y a environ trois mille ans ou un peu plus, la navigation dans le monde, surtout pour les voyages lointains, était plus importante que de nos jours.

N'allez pas présumer que j'ignore combien elle s'est développée dans vos pays depuis cent vingt ans: je le sais fort bien, et cependant j'affirme qu'elle était plus importante par le passé qu'aujourd'hui.

Que ce soit l'exemple de l'Arche sauvant les rescapés du genre humain du Déluge universel qui ait donné confiance aux hommes pour s'aventurer sur les mers ou qu'il s'agisse d'une tout autre cause, telle est, en tout cas, la vérité. Les Phéniciens, et surtout les Tyriens, avaient des flottes puissantes, de même que les gens de Carthage, cette colonie de Tyr située encore plus à l'ouest. Vers l'est, la marine égyptienne et celle de Palestine étaient tout aussi importantes. Il en allait de même pour la Chine et la Grande Atlantide, que vous nommez Amérique , où l'on ne possède plus aujourd'hui que des jonques et des canoës, et qui comptaient alors de nombreux vaisseaux de haut bord.

(...) A la même époque, et une génération plus tard, voire d'avantage, les habitants de la Grande Atlantide connurent une grande prospérité.

Le récit et la description faits par un homme célèbre de chez vous racontent que la descendance de Neptune s'était installée là. Cet auteur a décrit le temple magnifique, le palais, la cité, la colline et les multiples cours d'eau aisément navigables qui, comme autant de chaînes, encerclaient le site en question et son temple.

Il vous a rapporté que les hommes accédaient à ce temple en gravissant plus d'un degré, comme si ce chemin ascendant était une scala coeli. Bien que ce récit soit tout entier poétique et fabuleux, cependant il a ceci de vrai que ledit pays d'Atlantide, de même que celui du Pérou, appelé encore Coya, ainsi que celui du Mexique, qu'on nommait alors Tyrambel, étaient de puissants et superbes royaumes, par leurs armes, leur flotte et leurs richesses. Si puissants que, au même moment, ou en tout cas à moins de dix ans d'écart, ils entreprirent de grandes expéditions, ceux de Tyrambel traversant l'Atlantique en direction de la Méditerranée et ceux de Coya franchissant la mer du Sud jusqu'à cette île qui est la nôtre.

En ce qui concerne la première expédition, celle qui alla jusqu'en Europe, le même auteur de chez vous en eut, semble-t-il, quelque écho, grâce au prêtre égyptien qu'il cite. Car, sans doute, une chose de ce genre eut lieu. Quand à savoir si ce furent vraiment les anciens Athéniens qui eurent la gloire de tenir tête à ces assaillants et de repousser leur flotte, je ne saurais le dire. Mais il est sûr que jamais bateau ni homme ne revint de ce voyage.

(...) La vengeance divine cependant ne tarda pas à les punir de ces ambitieuses expéditions: moins d'une centaine d'années plus tard, la Grande Atlantide fut totalement détruite et ruinée, non par un tremblement de terre, comme le dit votre auteur (cette région du monde est peu sujette aux tremblements de terre), mais par un Déluge qui lui fut particulier, par une inondation. Car il y avait à cette époque dans ce pays des fleuves bien plus grands et des montagnes bien plus hautes que ce que l'on voit dans le Vieux Monde pour déverser de l'eau dans les parties basses.

Mais il est vrai aussi que, lors de cette inondation, la hauteur des eaux ne dépassa pas quarante pieds dans la plupart des endroits. Aussi, bien qu'elle fît périr en masse hommes et bêtes, quelques sauvages cependant, hôtes de la forêt, en réchappèrent. (...)


( traduction: Michèle Le Dœuff et Margaret Llasera, GF-Flammarion 770 )

 
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